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Le meilleur de Serge ULESKI : société, politique, art et culture

Etre au monde, oui ! Mais sûrement pas de Ce monde ! Plus de 18 années d’édition de billets de blog sur 20-minutes, Médiapart et Nouvelobs, aujourd'hui sur Overblog... Durant toutes ces années, sachez que tout ce qui est beau, rare, difficile et courageux ne m’aura pas été étranger ; d'où le choix de mes catégories et des sujets traités. Bonne découverte à tous !

1942-2014 : de la rafle du Vél d’Hiv à l’opération « Bordure protectrice » contre Gaza

 

Billet rédigé en 2014

              L’opération « Bordure protectrice » démarrée en juillet par l'armée israélienne qui prend pour cible le territoire de Gaza,  s’est achevée le 26 août 2014. Cette opération aura fait près de 2 200 victimes civils côté palestinien et 66 victimes militaires côté israélien.
 
           
***
 

                   Commémoration du 72e anniversaire de la Rafle du Vél d’Hiv - entre les et plus de 13 000 Juifs (majoritairement étrangers dits apatrides dont près d'un tiers étaient des enfants), ont été arrêtés puis déportés : moins d'une centaine en reviendront.

 
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" Que savez-vous de votre douleur en moi ? 

       - Tout, justement. C'est-à-dire : rien… puisqu’il n’y a rien."

 

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                      Pas un geste, pas un regard, pas une parole

 

             Ici, en France, d’aucuns s’activent sur les réseaux sociaux et comptent frénétiquement ceux qui sont tombés au champ d’honneur d’un massacre de population civile gazaouie : une quarantaine de soldats israéliens. Ils les nomment un par un - nom, prénom et visage -, ils les commentent, ils les célèbrent : « Tsahal, quand même ! C’est pas rien cette armée ! C’est bien la meilleure ! ».

A quand une manifestation de soutien à cette armée israélienne, ici à Paris ? Ils l’évoquent le plus sérieusement du monde.

          En face s’élève (ou bien plutôt : sombre...) leur trophée, fruit d’un dur labeur de trois semaines : un millier d’hommes, de femmes et d’enfants de Gaza, de tous les âges, passés par pertes et profits.

                       Non, ils n’auront pas un mot, pas un doute…

           Ils se prénomment Anton, David ou bien Alain… Chicheportiche ou Cohen, nés en France ; leur histoire familiale a pour région le Maghreb ; ils ont entre 20 et 35 ans, et sachez qu’ils n’auront pas un regard, pas un geste, pas une parole pour quiconque ressemblera de près ou de loin à ce que l’on nomme un Palestinien. Ne vous faites aucune illusion : ils ne lèveront pas un petit doigt, ils n’auront pas une pensée.

            « Si seulement vous les connaissiez, vous sauriez que c’est pas des gens comme nous !»

Et nous de rajouter : « Surtout depuis que vous leur avez tout pris ! »

Mais on s’en gardera bien : on sait déjà que le dialogue est impossible car, jamais ils ne regarderont l’histoire ( pour peu qu'ils la connaissent) de ces 50 dernières années en face : qui fait quoi, à qui, où, comment, pourquoi et pour le compte de qui.

 

             A côté ou en face, toujours sur les réseaux sociaux, on trouvera Karim, Driss et d’autres issus de ce qu’on appelle la culture arabo-musulmane : même âge, même géographie des origines.

C’est le silence… à l’intérieur on bouillonne mais on fait silence, chacun fixant son écran d’ordinateur ; et ce silence ne tient qu’à un fil ; une seule solution alors : ne rien évoquer, faire comme si rien ne se passait… comme si ça n’existait pas ; dans le cas contraire… ce sera l’explosion ; et les Karim et autres Driss en sortiront humiliés pour ne rien dire du danger professionnel que représenterait la manifestation de leur écoeurement et de leur colère sur leur lieu de travail, là où ils côtoient… l’autre camp ? Celui d’en face ?

            D'autres encore : Michel représentant syndical à la CGT, né de mère juive (Algérie) et de père européen non juif. Un membre de son syndicat s’adresse à lui :

« Tu as entendu parler de la manif de mercredi ? La CGT y sera, et toi ?

-      Sûrement pas. »

En deux mots, on tranche. Pas un mot de plus avant de s’éclipser de ce Michel qui a pourtant la réputation de savoir faire face quand il siège au comité d’une entreprise de 4500 salariés.

                   Là encore, aucun doute : indifférence totale.

             A propos de cette indifférence, difficile de ne pas penser  à une sorte de fanatisme tranquille, pépère, sûr de son droit. Non… au-dessus du droit ! là où rien ne peut vous atteindre : ni la morale, ni l’empathie... ni la compassion du "vainqueur haut la main et sans conteste" à l'endroit de ceux qu’il a trucidés… alors que plus on est fort, plus on peut se permettre quelques faiblesses…

                                  Non, rien, de rien dans rien.

Et cette indifférence-là, ce fanatisme pépère qui jamais n’a besoin de hausser le ton, on pourra toujours le regarder, l'observer et le commenter sous toutes les coutures... nul doute : ça se cultive, ça se prépare, ça s’apprend cette indifférence-là qui ne se reconnaît aucun devoir car personne ne naît à ce point indifférent au malheur des autres et à l'injustice qui les frappent, à l'exception de quelques sociopathes qui n’ont pas connu la chaleur d’un foyer, la caresse d’une mère, le regard sévère d’un père avant son pardon…

Mûrs et fins prêts pour une indifférence terrifiante ils sont ! Une indifférence d'un nouveau type : d'une violence contenue, incommensurable, d'une froideur de vainqueur d'une arrogance sans précédent, celle que confère une impunité totale, absolue ; une indifférence viscérale pour le sort que l'on réservera à celui qui contrarie vos ambitions, au-delà de tous les droits rattachés à la personne humaine, par-delà le bien et le mal, ailleurs, plus haut, plus loin : au-dessus de l'humain ?

De petits monstres froids, très sympathiques au demeurant et tolérants à condition de partager avec eux leur haine de tous ceux qui se permettent de juger Israël ?

La question est posée. Une réponse de Yeshayahou Leibowitz, considéré comme l'un des intellectuels les plus marquants de la société israélienne, surgira d'outre-tombe : ce Monsieur avait compris que dans chaque culture, dans chaque Peuple, dans chaque civilisation, sommeille un nazi (ICI) ou plus "conceptuellement parlant" : une indifférence non pas violente et chaude, mais paisible et froide à l’injustice, au droit, à la morale et pour finir… au crime... crime de masse, comme s’il ne pouvait en être autrement : Es muss ein : « Cela doit-il être ? Cela est ! »; ou bien encore : « Le faut-il ? Il le faut !»

            Alors, sérieusement, y a-t-il encore du monde pour s’interroger à propos de la rafle du Vél d’Hiv, 72 ans après : comment cela a-t-il été possible ?

Questionnement de tartuffes d'un humanisme manipulateur car...

La réponse, aujourd’hui, vous l’avez, là, sous vos yeux, partout, dans les lieux publics ! Il suffit de tendre l’oreille. Dans les entreprises aussi ; dans les ricanements de milliers d’internautes derrière leur écran d’ordinateur ; et puis aussi, et puis surtout : dans les médias… là où aucun journaliste ou éditorialiste est capable de dire « Assez !» à propos des crimes de l'Etat d'Israël commis sur une population sans défense, avec le soutien massif, ici, sur notre sol, d'une communauté toute entière, sans renvoyer perfidement et lâchement dos à dos Netanyahou et le Hamas pour ne pas avoir à dénoncer la politique d’un Etat avec complicité active et passive de l’Europe : le sacrifice du Peuple palestinien à propos duquel il n'y aura pas un mot, pas un regard, pas un doute tellement le droit et la loi ne sont même plus reconnus...

Quant aux valeurs humaines : " ... encore faut-il qu'il soit question d'êtres humains".

Une infirmité cette indifférence poison de l'âme ! Du grain à moudre pour les sciences humaines, la psychologie et la psychiatrie, nul doute !

             Alors, encore une fois, et sérieusement, y a-t-il encore du monde pour s’interroger à propos de la rafle du Vél d’Hiv sans être un Tartuffe ou un imbécile : comment cela a-t-il été possible ?

Que l'on ne s'y trompe pas : Gaza et l'indifférence qui l'accompagne sont de cette étoffe sur laquelle naissent les pires cauchemars, Vél d'Hiv et autres :

- "Ils n'ont que ce qu'ils méritent ! C'est des Arabes et des Musulmans... après tout... ".

- "Les Palestiniens ? C'est qui, c'est quoi ces gens ?"

- "Gaza, vous dites ? En quoi, ça nous concerne ?

- "Il faut s'en débarrasser ; ce sont des nuisibles ; ils veulent notre perte".

              Une fois de plus : que ceux qui s’interrogent encore à propos de l’indifférence qui a accompagné la rafle du Vel d’hiv en 1942, ne cherchent plus la réponse car c’est bien de la même indifférence qu’il est question vis-à-vis du sort injuste et cruel fait aux Palestiniens, à cette nuance près : le sort des palestinien est une cause entendue mondialement depuis 50 ans ; la rafle de juillet 42 n’a offert qu’une dizaine de minutes à tout un chacun pour prendre une décision : s’y opposer, secourir ou bien regarder ailleurs. La morale est ironique, autant que l’histoire et son balancier ; manifestement, les tartuffes, on ne les côtoie pas qu’en religion. Et la vérité de soi et sur soi, est toujours aussi cruelle qu’insupportable et pourtant, elle est le plus souvent, la même pour tout le monde.

 

*** 

             Rares sont les Peuples capables de se hisser à la hauteur de leur martyre, et plus encore quand on sait que ce martyre devrait pousser la victime, dans un élan irrépressible, à la sainteté ; c'est Simone Weil (la philosophe,  la vraie... pas l'autre) qui nous a rappelé dans les années 30 que le pire rapproche de la grâce et oblige la victime plus que son bourreau ; bourreau qui n'a qu'un droit : purger sa peine en silence, et la victime de ne jamais le supplanter.

            Pour sûr, à la hauteur de son martyre, un Peuple l’aura été ! Alors que son calvaire perdure sans espoir d’en connaître un jour la fin sinon dans la résignation mais au prix de son humanité car en face, l’intention est bien d’en faire un Peuple d’esclaves faute de pouvoir le faire disparaître comme par enchantement (d'autres temps, d'autres moeurs politiques ! Heureusement pour les Palestiniens !) ; un Peuple martyr donc ; et pour le premier d’entre eux - du moins, nous l’assène-t-on depuis quarante ans -, le martyre juif avec ses porte-parole très médiatiques (nommés "élites" : Finkielkraut, BHL, Taguief !) qui ont conduit une génération  de Juifs français ou de Français juifs (allez savoir ce qu'on ne peut plus connaître) la plus récente, à la déshumanisation tranquille et sereine de plusieurs millions d'êtres humains qui n'ont qu'un droit et qu'un devoir : aller voir ailleurs si ça se fait d'être palestiniens en Palestine ; or, il se pourrait bien que cette génération soit en passe d’occuper non pas la première mais bien la dernière des places sur un plan moral ; une génération libre jusqu’à l’impunité, libre mais sans excuse car...

Elle savait tout cette génération devenue adulte dans les années 2000 ! Elle avait entre 20 et 35 ans et elle savait tout et elle a tout cherché à nier, le mors aux dents, sans grimace, sans regrets et sans remords... imperturbablement indifférente.

 

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Pour rebondir, cliquez : Sioniste, vous avez dit sioniste ?

 

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