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Le meilleur de Serge ULESKI : société, politique, art et culture

Etre au monde, oui ! Mais sûrement pas de Ce monde ! Plus de 18 années d’édition de billets de blog sur 20-minutes, Médiapart et Nouvelobs, aujourd'hui sur Overblog... Durant toutes ces années, sachez que tout ce qui est beau, rare, difficile et courageux ne m’aura pas été étranger ; d'où le choix de mes catégories et des sujets traités. Bonne découverte à tous !

Lampedusa : île témoin de milliers de noyés sans nom

               

 

               Des années 90 à aujourd'hui, l'île de Lampedusa (île située au Sud Ouest de la Sicile,  à mi-chemin entre la côte Est tunisienne et l'île de Malte, d’à peine 20km2) aura été le théâtre de nombreux naufrages de bateaux d'immigrants : 20.000 personnes auraient péri avant même de toucher les côtes européennes.

Depuis le naufrage d'un bateau de migrants en octobre 2013, qui a coûté la vie à plus de 360 personnes, et le dernier en date, celui de cette semaine, qui a causé la mort de centaines de passagers, les réfugiés n'y sont plus accueillis : ils arrivent désormais en Sicile. Le nombre d’arrivées s'est élevé à 130.000 en 2014, contre 40 .000 en moyenne, chaque année, depuis l’an 2000.

                                         
Pendant leur périple, les passeurs forcent les candidats à l'exil à changer au moins trois fois d'embarcation - femmes, enfant, bébés... -, d’où les risques de naufrage car les bateaux sont surchargés.
La marine italienne patrouille en permanence. La Sicile arrive à saturation.

Ces opérations de sauvetage coûtent neuf millions d’euros par mois à l'Italie. Combien de temps tiendra-t-elle encore ? 
 

            "... à une heure de route de Catane (Sicile ionienne) se trouve le centre d’accueil pour migrants de Mineo. Avec ses 4.000 réfugiés qui vivent dans des maisons aux murs rose, ocre et orange, c’est l’un des plus grands d’Europe. De l’extérieur, c’est très coquet. S’il n’y avait pas les grillages, les barbelés et les militaires qui montent la garde, on dirait presque un village de vacances. La plupart des migrants sont là depuis plusieurs mois et attendent que leur demande d’asile soit examinée."

France INFO

  

*** 

 

              Des voyages toujours très périlleux pour les candidats à l'exil et leur famille ; boat-people... voyages aux naufrages meurtriers : en 2014, 3.000 migrants ont perdu la vie entre les côtes libyennes et la Sicile.

Sur l'île de Lampedusa, un musée leur est consacré : "musée des invisibles", "musée du silence"... des milliers de corps sans vie, sans nom repêchés et recueillis... car, s'il leur fallait une sépulture, ne fallait-il pas aussi qu'il en reste "quelque chose" de tous ces corps ?!  

               Bagages, photos, objet usuels, objet du quotidien, vêtements de rechange, jouets de bébés et d'enfants, un biberon, un Coran, une image de la Vierge, des chaussures d’enfants, quelques pièces de monnaie retrouvées au fond d'une poche, un peigne, quelques apprêts féminins, ustensiles, petits outils... ce sont des centaines d’objets retrouvés sur les corps, d'autres rejetés par la mer sur le rivage; des centaines de fragments de vie que Giacomo Sferlazzo et les membres de l’association Askavusa ont collectés et conservés car, si tous ces objets ont quitté leurs propriétaires, avec cette collecte, dans ce musée, c'est par eux et avec eux que tous ces corps sans vie retrouvent une raison d'avoir appartenu, un jour, au monde des vivants.

               Alors, oui ! Ils ont bien existé ! Oui, ils ont un jour croisé notre route et leur destin funeste  aussi. 

 

***

 

              Mais alors, ne soyons pas dupes pour autant ! Avec cet exode, avec ces morts et ces réfugiés sans avenir, c’est toute l’Afrique qui vient nous rappeler des politiques économiques iniques qui affament celui qui cultive la terre, assoiffent celui qui apporte l'eau et réduisent à la misère celui qui voit passer entre ses mains des matières non seulement premières mais précieuses ; des politiques criminelles telles que la destruction de la Libye dont  90% des candidats à l'exil traversent ce qui n'est plus qu'un territoire sans Etat, sans police ni armée ; des politiques d’instrumentalisation des antagonismes qui plongent des régions entières dans le chaos ; vente d’armes, corruption passive et active pour le plus grand profit des multinationales et des Etats à leur merci : destruction des marchés locaux pour mieux les contrôler ; dépendance de millions d’êtres humains vis à vis d'importations alimentaires subventionnées comme "c'est pas permis" par les économies occidentales ;  aides destinées à asservir et à s’assurer de l'acheminement en bon ordre des ressources et autres richesses dont le sol africain regorge.

 

        Vous voulez savoir où en est l'Afrique et les politiques de domination, de vol et de spoliation des multinationales à son endroit ? Allez donc à Lampedusa et en Sicile, à Mineo, faire un stage en géopolitique et en économie dite mondialisée et interdépendante !

            En tout état de cause, le pire serait que nous acceptions  l'indifférence des institutions de notre pays et de celles de l'Europe, de tous ses lieux de décisions, face aux centaines de noyés venus d'Afrique car, n'ayons aucune illusion : notre indifférence face à l'indigence des mesures qui seront prises  par l'Europe pour sauver nos frères et soeurs en humanité pourrait bel et bien à terme encourager ces mêmes institutions à faire preuve de la même indifférence à l'endroit de nous tous, et en premier, les humbles, les sans-grades et les plus fragiles, face aux prochaines catastrophes sociales et environnementales qui ne manqueront pas de nous frapper dans les décennies à venir : l'histoire nous apprend à ne jamais encourager un Etat à ne pas agir face à une catastrophe humaine même si celle-ci semble nous concerner qu'indirectement et de loin.

Ce qui en jeu aujourd'hui, c'est notre capacité à ne pas se satisfaire du cynisme des Etats et des Institutions internationales car, moins on humanise les problèmes, plus on court le risque d'une gestion inhumaine des catastrophes, jusqu'à une déshumanisation générale.

 

                                

Vivre libre ou mourir : salut à toi !

 

 

 

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