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Le meilleur de Serge ULESKI : société, politique, art et culture

Etre au monde, oui ! Mais sûrement pas de Ce monde ! Plus de 18 années d’édition de billets de blog sur 20-minutes, Médiapart et Nouvelobs, aujourd'hui sur Overblog... Durant toutes ces années, sachez que tout ce qui est beau, rare, difficile et courageux ne m’aura pas été étranger ; d'où le choix de mes catégories et des sujets traités. Bonne découverte à tous !

Juan Branco : le pari de la réussite dans le renoncement aux ors de la République

A l’écoute des entretiens que Juan Branco accorde aux acteurs de l’Internet…  et dont il n’est jamais avare, on peut légitimement poser le questionnement suivant : Branco a-t-il vraiment l’étoffe des choix qui ont été les siens… a fortiori… très tôt dans sa vie ? Ses choix et ses conséquences matérielles et sociales : l'absence de carrière, par exemple ? Car force est de rappeler que Branco n’appartient pas à une génération capable de sacrifice ; la dernière génération qui l’a été, à son corps défendant, fut la génération contrainte à la guerre d’Algérie ; ce sera la dernière  génération ; s’ensuivront des années de type « jouir sans entraves » au nom d’un « Il est interdit d’interdire !» ; d’autant plus que rien dans le CV (études et postes occupés) ni dans la biographie (milieu familial) de Juan Branco le prédisposent à un tel sacrifice.

Branco n’a évidemment pas l’étoffe d’un Mandela, d’un Assange, d’un Abbé Pierre ou d’un Vergès… pour lesquels les questions qui se posaient à eux étaient d’ordre moral, anthologique et historique ; il pouvait être question aussi de leur survie physique. Branco est issu d’un milieu sans histoire ; un milieu à l’identité stable, confirmée, reconnue socialement ; identité légitime et non contestée : un milieu bourgeois (à ce sujet Branco ne manque que rarement une occasion de nous le rappeler et d’évoquer les célébrités qu’il a pu côtoyer car il semble avoir du mal à s'en défaire comme pour mieux l'oublier et passer à autre chose). Et si ce sont les fils et les filles de la bourgeoisie qui pensent - et font les révolutions (quand les conditions sont réunies (Rosa Luxembourg, Lénine, Mao, Castro, le Che) – plus prosaïquement… si ce sont leurs fils et filles qui aiment se faire peur (les membres d’Action directe étaient des enfants de la bourgeoisie)… les temps ont bien changé ; Internet a permis à nombre d’entre eux d’appeler à la révolution sans coup férir.

Reste le combat écologique qui ne fait que commencer ; combat qui nous promet une violence d’Etat proche de ce qu’a pu être les années de plomb de la guerre d’Algérie en métropole : Branco y trouvera-t-il sa place ? Qui plus est… une place de premier choix ? La nature de ce combat appelle le plus souvent à la clandestinité : on n’y affiche pas sa carte d’identité.

Aujourd’hui, qu’il l’admette ou non, Branco est bien obligé de lever la tête pour regarder un Attal ou bien un ministre des affaires étrangères de 27 ans nommé  Stéphane Séjourné… et eux, en surplomb, de détourner le regard par dédain, voire mépris ; sans doute aussi pour mieux tentés d’étouffer un rire tonitruant. Branco n’oublie jamais de rappeler ce qui suit : « J’aurais pu être l’un d’eux ; j’étais programmé pour ça ».

Marginalisé, on peut craindre que l’aigreur et le dépit ne  finissent par prendre le dessus. Déjà dans ses commentaires à propos des figures de la médiacratie, au sujet du personnel politique et ministériel, on détecte l’abus du recours au procès d’intention ad hominem, pas toujours, hélas, pertinent ni nécessaire ; un procès stérile qui n’éclaire pas vraiment (à l'exception de son ouvrage sur Macron, bien évidemment). De plus… cette tendance qui est la sienne et qui consiste à expliquer à quel point des forces « révolutionnaires sont à l’œuvre » et qu’il « en est »… alors qu'aucun fait ne vient le corroborer... cette propension frôle la mythomanie ou un wishful thinking consommé et franchement déplacé à l’heure où ce vers quoi nous nous dirigeons n’a que peu à voir avec la réalité d’une gauche révolutionnaire aux portes du pouvoir (c’te bonne blague !) puisqu’il est raisonnablement question de comprendre que cette gauche - même a minima… une gauche de gouvernement donc - est hors-jeu pour les 20 prochaines années, sinon plus ; en effet, on peut sans risquer de se tromper, affirmer que les années à venir appartiennent à des gouvernements qui seront chaque jour, à chaque élection... plus autoritaires encore ; des gouvernements cooptés par des réseaux dont les analyses à propos de ce qui est et ce de qui doit être appartiendront - et appartiennent déjà - à une conception délibérément conflictuelle, voire vindicative et guerrière, et ce pour le plus grand profit de ce qu’il est convenu d’appeler l'oligarchie mondiale  : contrôle, précarité, désinformation, intimidation et sanctions (conception classée prosaïquement à droite et à l’extrême droite ; pour autant… que les thuriféraires du RN ne s’illusionnent pas : MLP est hors-jeu elle aussi ; en dehors du fait qu’il n’a aucune compétence reconnue, aucune expérience, qu’elle ne travaille pas les dossiers… les membres de son équipe ont trop l’air de ce qu’ils sont ; ce qui est une faute impardonnable en politique ; le Système n’oubliera pas de nous le rappeler ; le CRIF a déjà pensé à renvoyer le RN au FN et aux fondements qui ont présidé à sa création : l’antisémitisme … - le racisme n’importune pas le CRIF ni la torture durant la guerre d’Algérie ni les ratonnades)…

Le Système qui n'a pas voulu de Fillon, et ses médias, sauront nous proposer un candidat déjà élu pour 2027  (un clone de Macron, d’un Edouard Philippe ou d’un  Bruno Lemaire) ; tout sera violent pour le vécu de millions de nos compatriotes ; tout sera bon-enfant et paternaliste, voire rassurant, pour le non-vécu de millions d’autres : téléspectateurs et électeurs de leur état ; ceux qui ne ratent jamais une élection ; présents indubitablement… même en fauteuil roulant.

Aujourd’hui, tout est média. Branco n’ignore rien du fait suivant : quiconque n’est pas « médiatique » ou « médiatisé » n’existe pas. Or, Branco n’acceptera pas de ne pas exister alors que ses choix qui sont les siens le condamnent précisément à la marginalité… du moins… loin de ce qu’il était en droit d’espérer (d’ambitionner) pour lui-même, de par sa formation et sa naissance. D’autant plus qu’aucun média dominant (ces médias qui, justement, vous font exister) ne peut l’accueillir aujourd’hui ; Internet ne peut être qu’une maigre consolation comme il peut l’être pour tous ceux que les médias ont rejetés (Onfray, accro aux médias qui l’ont fait, l’a compris assez tôt ; il a évité le pire : son virage néo-conservateur à l’américaine n’y est pas étranger ; C-News l’a alors accueilli. Il y coulera des jours paisibles).

Aussi, retour aux prémices de notre analyse : le soupçon à propos de l’absence d’étoffe de Branco ; une étoffe susceptible de lui permettre d’accepter… ce que d’aucuns qualifieront d'« échec » programmé (si l’on raisonne d’un point de vue carriériste ou arriviste)  depuis le premier jour (le refus d’une carrière sous les ors de la République) et qu’il était, dans sa naïveté, supposé transformer en une réussite pleine et entière.

Itinéraire à suivre donc que celui de Juan Branco.

 

P.S. Dans l'entretien proposé, on ne pourra pas ne pas remarquer que Branco consacre énormément de temps à nous parler de ceux dont il n'a pas souhaité partager la carrière  comme s'il en était un peu quand même... finalement... de cette carrière en l'évoquant plus souvent qu'à son tour. 

Le Gotha politique n'a pas de secret pour lui ; il est intarissable à son sujet.

Alors que... occupés par un engagement qui  s'avèrerait chronophage, d'autres seraient bien davantage enclins à nous parler de cet engagement qui serait le leur, de sa nature, de son action, de son vécu, des enseignements qu'ils ont pu en tirer ; ce que cet engagement vous apprend, en quoi il vous grandit.

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